Pierre-Yves Cardinal explique comment il gère l’insécurité du métier d’acteur

Puisqu’il a été exposé aux arts durant sa jeunesse, Pierre-Yves Cardinal a rapidement développé une sensibilité aux textes, au cinéma et au théâtre. L’acteur a rêvé de ce métier, mais jamais il n’aurait pu imaginer les projets d’envergure qui l’attendaient au tournant. De Robert Lepage à Xavier Dolan, son parcours est ponctué de rencontres avec les plus grands.
• À lire aussi: Les intrigues de l'automne de la prochaine saison de «L’Échappée»
• À lire aussi: Plein de nouveaux personnages dans «L’Échappée»
• À lire aussi: Voici quand recommencent vos téléromans favoris
Pierre-Yves, heureux de retourner sur le plateau de L'Échappée après une pause aussi longue?
Oui, je suis content de recommencer à tourner, mais j’espère que les règles vont s’assouplir, dans le respect de chaque membre de l’équipe. Les scènes de confrontation et d’amour nécessitent une certaine proximité. Personnellement, je serais prêt à prendre des risques, mais je me plie aux décisions de la production.
Certains de vos projets ont-ils été reportés?
Oui. Je devais vivre le printemps le plus chargé de ma vie! Le film La cordonnière a été reporté. Comme je fais des voix et que j’ai un studio à la maison, j’ai rapidement reçu des demandes. Je n’ai pas travaillé pendant environ deux semaines et demie. Je n’ai pas trouvé la pause déplaisante, car être laissé en jachère, ce n’est jamais mauvais en soi. Les travailleurs du milieu culturel sont extrêmement vulnérables dans la situation qu’on vit présentement. La plupart des métiers ont repris, mais pas les nôtres. J’ai plusieurs amis qui sont complètement arrêtés depuis des mois.
Comment gérez-vous l’insécurité du métier?
Je suis choyé parce que je fais des voix. Je n’ai jamais connu de périodes prolongées sans avoir de revenus. J’aime aller travailler et voir mes collègues; la vie sociale qui vient avec le métier est vraiment précieuse. On l’a constaté pendant le confinement: voir du monde est un privilège. Je suis choyé par le métier et je travaille fort. Il y a une part de chance dans tout ça, car des gens nous tendent la main pour travailler avec eux. Notre succès, on le doit à soi, mais aussi aux autres.
Votre carrière est particulièrement diversifiée: théâtre, télé, cinéma, voix... Avez-vous toujours réussi à surfer sur la vague?
J’apprécie le fait de pouvoir évoluer dans plusieurs médiums; cela m’amène une certaine constance. Quand je ne fais pas du théâtre, je fais de la télé ou du cinéma. Ça me garde en forme comme acteur et ça me permet d’être impliqué dans des projets très différents. Cet été, j’ai fait une narration pour un documentaire sur l’histoire des ciné-parcs au Québec. L’année d’avant, j’étais sur les planches avec Robert Lepage à Paris. Quelques années auparavant, j’ai tourné avec Xavier Dolan. C’est extraordinaire de pouvoir faire tout cela! J’apprécie autant les petits projets que ceux d’envergure. Avec le temps, on se fait des amis. Et se retrouver sur des productions avec des amis, c’est vraiment agréable.
Votre parcours est-il parsemé de belles grandes rencontres?
Oui, il y en a eu plusieurs! Nous avons parlé de Xavier Dolan et Robert Lepage. Ce sont des rencontres marquantes. Ce qui m’a le plus impressionné, c’est de constater que l’une de leurs grandes forces, c’est d’amener leurs collaborateurs à créer de manière intensive. Tout le monde leur amène de l’eau au moulin et, même s’ils font le tri parmi toutes ces propositions, ils nous amènent plus loin dans notre créativité. C’est extrêmement valorisant. On en ressort grandi comme artiste et plus confiant. Ils arrivent à aller chercher le meilleur en chacun de nous. C’est l’une de leurs grandes qualités parmi bien d’autres. C’est excitant de travailler avec ces créateurs.
De quoi rêviez-vous lorsque vous étiez jeune étudiant en théâtre?
Ce qui m’a amené à faire ce métier, c’est en premier lieu l’amour du cinéma. En faisant l’école, j’ai développé une certaine sensibilité aux textes de théâtre. Alors, le cinéma était mon premier amour, mais j’avais aussi envie de faire du théâtre. Depuis que je suis tout petit, je fais des voix de bonshommes. Ça m’a toujours plu. Le doublage s’est donc ajouté à ma carrière. C’est extrêmement exigeant, mais quand la magie opère, c’est vraiment particulier. Mais il reste que c’est le cinéma qui me fait le plus vibrer.
Y a-t-il eu un déclencheur dans votre vie, un film ou une personnalité, pour vous inspirer?
Je ne sais pas s’il y a eu un élément déclencheur... Comme tout le monde, quand j’étais jeune, j’ai regardé les trucs populaires, tels que Back to the Future, que tout le monde aimait. Avec le temps, je suis tombé sur des films de Godard, Bergman, Truffaut, Lynch. J’ai fait un bac en communication avec une spécialisation en cinéma. C’est là que je me suis intéressé au cinéma de répertoire. Puis, les choses se sont faites naturellement; j’étais aussi attiré par le jeu. Je voulais voir si je pouvais entrer dans une école de théâtre et j’ai été accepté. Je me voyais derrière, mais aussi devant la caméra.
Êtes-vous en mesure d’identifier le moment où le désir de faire ce métier s’est installé en vous?
Je ne peux pas dire à quand ça remonte... J’ai toujours aimé faire des spectacles. J’ai un vague souvenir d’un spectacle à l’école primaire. Ce genre d’intérêt peut naître vraiment tôt. C’est pour cette raison qu’il est important d’initier les enfants à toutes sortes de choses. Je me souviens d’avoir fait rire ma famille à table en faisant des niaiseries ou des voix comiques. J’ai toujours aimé me mettre de l’avant en inventant des histoires et des personnages. J’ai aussi des souvenirs de ma mère qui me lisait des histoires lorsque j’étais enfant. Je pense que plein de petits germes ont donné naissance à cet intérêt. Je suis aussi un gars sportif; j’adore le sport! C’est important de se développer physiquement, mais on gagnerait à remettre la culture à l’avant-plan. Qu’on parle de l’art de bien s’exprimer, de la langue, de la musique, de la danse ou des arts de la scène, ce sont des pôles importants dans le développement des individus.
Avez-vous eu cette chance d’être exposé aux arts dès votre plus jeune âge?
J’ai eu la chance de naître au sein d’une famille de la classe moyenne typique. Cela a contribué à développer mon intérêt. Mes parents avaient du temps et les moyens de m’amener au cinéma, de me faire écouter de la musique. Il faut que toutes les classes de la société aient accès à la culture et au sport. Sinon, on n’a pas les mêmes outils pour faire face à la vie. C’est important que les jeunes soient initiés aux arts. Et dans notre milieu culturel, nous avons besoin d’une variété ethnique et des membres de la communauté LGBTQ pour mieux représenter la réalité.
Compte tenu de votre jeunesse, votre choix de carrière n’a donc surpris personne...
Mes parents n’étaient pas surpris, mais ils n’étaient pas chauds à l’idée de me voir devenir acteur. Même si j’ai beaucoup aimé les maths, j’avais un esprit plus créatif que mathématique. Lorsque j’ai dit à mes parents que j’aimerais devenir acteur, ils m’ont demandé si je ne souhaitais pas faire quelque chose de plus stable... (rires) C’est sûr qu’avec le temps, j’ai réussi à convaincre ma famille que ça irait.
L’Échappée, de retour le lundi 26 octobre à 20 h, à TVA.