Doc humanité: Outremont et les Hassidim | Les deux solitudes
Samedi 18 avril à 22 h 30, Radio-Canada

Dans le quartier Outremont, à Montréal, les Juifs ultra-orthodoxes composent près du quart de la population. Ils demeurent toutefois bien incompris par leurs voisins, comme l’expose le documentaire Outremont et les Hassidim.
Depuis plus de 70 ans, Outremont est le quartier d’adoption de Juifs ultra-orthodoxes venus se rassembler dans les lieux de culte de la rue Bernard. Ils sont aujourd’hui plus de 7000. Leur présence de plus en plus imposante crée des tensions chez ceux qui ne comprennent pas leurs valeurs, creusant un fossé de plus en plus profond entre les Hassidim et les laïcs d’Outremont.
À l’aube du référendum d’arrondissement de 2016, qui a permis aux citoyens de s’exprimer sur l’adoption d’une loi interdisant les nouveaux lieux de culte sur la rue Bernard, ces tensions sont plus vives que jamais. C’est pourquoi le réalisateur et producteur Eric R. Scott tente d’entamer un dialogue dans le documentaire Outremont et les Hassidim.
Un sujet chaud
D’un côté du ring, on trouve des citoyens tels que Pierre Lacerte, du blogue Accommodements Outremont, qui se bat pour que les Hassidim respectent les lois du quartier. Selon lui, les Juifs ultra-orthodoxes multiplient les dortoirs et les synagogues illégales sur la rue Bernard, où leurs vitrines placardées diminuent le dynamisme et l’esthétisme de cette rue commerciale. Il affirme toutefois qu’il n’a rien d’un antisémite, puisque les lois d’Outremont devraient s’appliquer à tous sans exception.
Dans le coin opposé, l’activiste communautaire Mayer Feig défend son peuple en expliquant que la population hassidim est en croissance. Puisqu’on refuse toujours leurs demandes de nouveaux lieux de rassemblement, ils doivent se débrouiller avec les moyens du bord, et cela leur donne l’impression qu’ils sont loin d’être les bienvenus. En fait, Feig se permet d’affirmer que ce sont des citoyens comme Pierre qui provoquent les conflits, puisque leurs mensonges contribuent à la mauvaise réputation des Hassidim d’Outremont.
Ouvrir la discussion
D’autres se situent à mi-chemin entre ces extrêmes, notamment Michèle Dupont, une résidente d’Outremont qui a toujours été curieuse de ses voisins. Toutefois, comme plusieurs autres citoyens, elle constate avec tristesse qu’il est difficile d’entrer en communication avec les adultes de la communauté hassidim, qui semblent évoluer dans un monde à part. Monique Jeanmart, une sociologue qui habite le quartier, va jusqu’à dire que les Juifs ultra-orthodoxes refusent de s’intégrer à la communauté québécoise, car ils ignorent leurs voisins et qu’ils ne parlent pas français.
Mindy Pollack, une conseillère municipale d’Outremont qui fait le pont entre les deux communautés, rencontre Michèle et Monique afin d’éclaircir quelques points. Elle nous apprend notamment que la majorité des Hassidim parlent français, même s’ils sont gênés de le faire, et que leurs grands-parents leur ont appris à se méfier de leurs voisins après avoir vécu les horreurs de la Seconde Guerre mondiale. Les plus jeunes se montrent toutefois beaucoup plus ouverts. L’un d’eux, Cheskie Weiss, un Hassidim de la communauté Belz, explique que l’équilibre entre la protection de la culture et l’ouverture sur le monde est particulièrement délicat.
Le bon voisinage
De son côté, le maire de l’arrondissement, Philipe Tomlinson, comprend que les Québécois sont allergiques à la religion depuis la Révolution tranquille. Il demeure persuadé qu’ils peuvent vivre en bonne entente avec les Hassidim... même s’ils ne sont pas «assimilés». Il le prouve en participant à Lag b’Omer, une fête juive populaire où il a droit à un accueil chaleureux.
Lorsque le maire va à la rencontre de ses citoyens hassidim ou lorsque Michèle Dupont fait l’effort de mieux connaître ses voisins, on constate que les Juifs ultra-orthodoxes ne sont pas aussi froids qu’on pourrait le croire. En fait, les communautés laïque et hassidim sont surtout séparées par des années d’incompréhension, de craintes et de jugements. Pour retrouver l’harmonie, tous les citoyens d’Outremont devront donc apprendre à communiquer, à se comprendre et à se respecter.